Qu’est-ce que les résultats de l’élection fédérale nous apprennent sur l’opinion qu’ont les Canadiens et Canadiennes au sujet du paysage politique énergétique et environnemental du pays?

Les points de vue et opinions exprimés dans cet article sont ceux des auteurs et ne reflètent pas nécessairement la politique ou la position officielle de l’Association canadienne du gaz

Par Tim Powers

La 44e élection générale du Canada s’est terminée le 20 septembre 2021. Les résultats de ce scrutin ont presque entièrement reflété le résultat de la campagne de 2019. Les libéraux ont été ramenés au pouvoir une nouvelle fois avec un gouvernement minoritaire. Les conservateurs serviront à nouveau de principal parti d’opposition, le Bloc québécois et le NPD semblant être plus des partenaires que des adversaires pour les libéraux lorsque le Parlement reviendra le 22 novembre.

Le vote de 2021 a très peu porté sur l’environnement et la politique énergétique. En fin de compte, il s’agissait plutôt de savoir si Justin Trudeau devait être réélu ou s’il fallait donner une chance à Erin O’Toole. Bien que l’actuel premier ministre ait gagné, il n’a finalement pas obtenu la majorité tant recherchée. Après l’élection, M. O’Toole a fait l’objet d’appels précoces de la part de certaines parties du mouvement conservateur pour qu’il se retire — pour l’instant cependant, il semble qu’il tienne bon.

Dans les premiers jours de la campagne, l’avenir de l’Afghanistan, le retrait du Canada et des troupes alliées de ce pays, ainsi que la situation critique de nombreux Afghans qui avaient aidé notre pays pendant le conflit, ont dominé la discussion. Après quelques semaines de couverture intense de ce sujet, le récit s’est déplacé vers toutes les questions relatives à la pandémie, puis vers une controverse auto-infligée des conservateurs sur l’interdiction ou non de certaines armes au Canada. Il aurait fallu le vieux détective légendaire Colombo pour trouver, au-delà des mentions dans les plateformes, une quelconque discussion sur l’énergie en général, le gaz en particulier, ou l’environnement.

Bien que les élections n’aient pas donné un aperçu de ce que les prochaines années pourraient signifier en termes de politique environnementale et énergétique, je pense qu’il y a quelques indicateurs clés à surveiller qui pourraient nous orienter. Le premier indicateur clé a été les nominations au Cabinet, et en particulier le déplacement de Jonathan Wilkinson d’Environnement et Changement climatique (ECCC) vers les Ressources naturelles, et le placement de l’activiste défenseur de l’environnement Steven Guilbeault à ECCC. L’accent très fort mis sur l’environnement ne fera que se renforcer. Et les remarques du premier ministre à la COP l’ont clairement démontré.

Bien sûr, le discours du Trône de la fin novembre sera un autre indicateur avancé de la direction que prendra le gouvernement Trudeau en matière de politique. Ce discours du Trône pourrait être plus crucial que les autres de l’ère de Justin Trudeau s’il énonce le programme de ce qui pourrait être son dernier mandat.

Les spéculations à Ottawa et dans les environs ne valent généralement pas grand-chose, mais actuellement, on semble mûre à l’idée qu’à un moment donné au cours de cette législature, le premier ministre annoncera qu’il ne se représentera pas. Il y a de nombreuses raisons pour lesquelles cela est logique, y compris la difficulté historique pour un leader de remporter quatre gouvernements consécutifs et le succès général du Parti libéral dans l’organisation des passations de pouvoir.

Mais ne vous y trompez pas, si Justin Trudeau se retire effectivement de la politique, il aura à cœur de laisser un héritage. Il n’est pas difficile de concevoir que l’un des héritages qu’il souhaiterait voir se concrétiser serait d’ordre environnemental, avec des objectifs ambitieux en matière de gaz à effet de serre, un éloignement accru des ressources non renouvelables et une restructuration économique correspondante. Cela pourrait arriver et avec le NPD et le Bloc comme alliés à court terme, tout est possible.

« Il n’est pas difficile de concevoir que l’un des héritages qu’il souhaiterait voir se concrétiser serait d’ordre environnemental, avec des objectifs ambitieux en matière de gaz à effet de serre, un éloignement accru des ressources non renouvelables et une restructuration économique correspondante ».

Tim Powers, est le président de Summa Strategies Canada et le directeur général d’Abacus Data, dont les deux sièges sociaux sont à Ottawa. M. Powers est souvent invité à l’émission Power and Politics du réseau de télévision CBC, ainsi qu’à la chaîne VOCM de Terre-Neuve-et-Labrador, sa province d’origine.


Par Gabriela Gonzalez

Certaines personnes ont osé dire que les élections fédérales de 2021 étaient une perte de temps et de ressources, mais je ne suis pas d’accord avec elles pour deux raisons qui définissent notre époque : la garde d’enfants et le climat. En tant que mère d’un enfant de trois ans, j’ai des arguments tangibles en faveur des garderies abordables. En tant que libérale de longue date qui a récemment déménagé de Toronto à Calgary, j’ai une nouvelle perspective sur la politique énergétique et environnementale et, sans surprise, c’est ce dont je traite dans le présent article.

Les Canadiens et Canadiennes veulent que l’on s’attaque réellement au changement climatique

Lors des élections fédérales de 2021, 16 035 732 Canadiens et Canadiennes, soit 94 % des votes exprimés, ont voté pour des partis dotés d’un plan climatique. La population canadienne d’un océan à l’autre a envoyé un message clair : on a dépassé le stade des débats, et des mesures concrètes doivent être adoptées pour faire face à l’urgence climatique.

« La population canadienne d’un océan à l’autre a envoyé un message clair : on a dépassé le stade des débats, et des mesures concrètes doivent être adoptées pour faire face à l’urgence climatique ».

Leadership du secteur de l’énergie

Les politiques climatiques des libéraux en 2015 étaient visionnaires et parfois perçues comme trop ambitieuses, mais elles ont sans aucun doute poussé les secteurs, en particulier le secteur énergétique (qui nécessite beaucoup de ressources), sur la voie de la durabilité et de la diversification. En juin de cette année, les plus grands producteurs de sables bitumineux du Canada ont annoncé une alliance sans précédent pour atteindre des émissions nettes nulles de gaz à effet de serre d’ici 2050 afin d’aider le Canada à atteindre ses objectifs climatiques, y compris ses engagements relatifs à l’Accord de Paris. Il s’agit d’une mesure importante qui envoie un message fort aux employés, aux investisseurs et à la population canadienne, à savoir que le secteur prend des mesures sérieuses en faveur de la durabilité.

Les populations de Calgary et d’Edmonton soutiennent des mesures climatiques ambitieuses

Alors que nous savons que les Canadiens et Canadiennes des provinces comme le Québec, l’Ontario et la Colombie-Britannique sont généralement favorables aux mesures climatiques, la population albertaine de quatre circonscriptions a surpris le pays en élisant des députés néo-démocrates et libéraux. Qui plus est, les populations de Calgary et d’Edmonton ont également élu des maires progressistes et diversifiés. À Edmonton, Amarjeet Sohi, un ancien ministre libéral des Ressources naturelles, a été élu maire avec une impressionnante proportion de 45 % des voix, soit plus du double de son plus proche adversaire. Malgré un ralentissement important de l’économie de l’Alberta en raison d’un autre effondrement des prix du pétrole et des effets de la pandémie, les habitants de Calgary et d’Edmonton ont été audacieux et ont voté en faveur de mesures ambitieuses de lutte contre le changement climatique.

Les conservateurs ont pris au sérieux la politique climatique

L’orientation de la politique du Parti conservateur en matière de changement climatique, qui comprend la tarification du carbone, a surpris plusieurs Canadiennes et Canadiens, mais la plupart d’entre eux savaient qu’un plan climatique était un prérequis pour être considéré comme une opposition viable, et surtout comme un gouvernement en devenir. Un sondage à la sortie des urnes commandé par Clean Prosperity a révélé que plus de 40 % des électeurs conservateurs ont déclaré que le Parti devrait en faire plus pour le climat, tandis que 10 % ont déclaré que le Parti devrait en faire moins. L’inclusion du prix du carbone dans le plan des conservateurs a changé la donne pour le Parti. Plus de six électeurs sur dix ont dit qu’ils ne pouvaient pas voter pour un parti sans plan climatique crédible et ont déclaré que la taxe sur le carbone était une priorité pour ce type de plan.

En conclusion, cette élection fédérale a été une victoire pour les familles canadiennes et la planète, et nous nous en portons tous et toutes mieux.

Gabriela Gonzalez est directrice des communications et de la participation du public chez Argyle et une bénévole libérale de longue date qui a récemment déménagé de Toronto à Calgary. Elle aime vivre près des montagnes avec sa famille et a embrassé l’identité de résidante de l’Ouest canadien. Vous pouvez la joindre sur Twitter (@GabrielainYYC) ou sur LinkedIn.


Par Kathleen Monk

Avec les événements climatiques catastrophiques qui se produisent tout autour de nous, et après un été au Canada marqué par des vagues de chaleur record et de vastes feux de forêt, il était surprenant de constater que les questions du changement climatique et de l’environnement n’ont pas dominé davantage la campagne électorale fédérale.

Et si les résultats des élections n’ont pas beaucoup changé la répartition des sièges au Parlement, cela ne signifie pas que la prochaine législature sera comme la précédente.

Le gouvernement libéral de Justin Trudeau, du moins pour un certain temps, ne peut plus agiter le gros bâton d’une possible élection auprès des partis d’opposition. Pour sa part, le chef conservateur Erin O’Toole sera probablement plus préoccupé au cours des prochains mois à gagner le soutien de son propre caucus que par les libéraux. Et bien que les néo-démocrates aient fait quelques gains, l’élection 2021 n’a pas eu de grands gagnants. Même le parti qui a subi la plus forte baisse, le Parti vert, pourrait pointer du doigt les luttes intestines au sein de son parti comme étant la cause de son recul, plutôt qu’un signe de changement d’opinion des Canadiens et Canadiennes sur l’environnement.

Ce qui a le plus changé dans le paysage politique canadien, c’est que tous les partis se sont rapprochés de la politique climatique.

Les libéraux et les conservateurs ont tous deux proposé des investissements massifs dans la capture du carbone et une norme de carburant à faible teneur en carbone, ainsi que dans un régime qui fixe un prix pour le carbone. Bien que les conservateurs aient toujours pris des engagements fermes pour soutenir l’industrie pétrolière et gazière du Canada, ils ont employé un langage plus explicite que jamais pour reconnaître que le changement climatique est bel et bien réel. La question est maintenant de savoir à quel point les conservateurs prennent vraiment au sérieux cette nouvelle préoccupation pour le changement climatique, ou s’ils vont simplement revenir, tel un élastique, à leur ancienne approche de la tête dans le sable à ce sujet.

Quant aux néo-démocrates, ils ont bien expliqué pourquoi le gouvernement libéral n’en a pas fait assez pour lutter contre le changement climatique. Ils ont déployé des efforts considérables pour faire passer le message que le gouvernement Trudeau est fort en paroles, mais faible en actions, notamment en ce qui concerne l’élimination des subventions aux combustibles fossiles et les mesures concrètes pour atteindre des objectifs ambitieux de réduction des émissions.

Les libéraux devront choisir qui sera leur partenaire de danse au cours de la prochaine législature. Ce sera le calcul politique à surveiller. Chercheront-ils à obtenir le soutien des conservateurs sur des sujets comme la capture du carbone et une approche plus favorable à l’industrie? Ou chercheront-ils à s’associer au NPD sur les questions de l’élimination des subventions aux combustibles fossiles et de l’adoption de mesures plus rigoureuses pour lutter contre le changement climatique?

Connaissant le modus operandi des libéraux, la réponse à ces questions résidera dans la voie que le Parti pense être la plus susceptible de les mener vers un gouvernement majoritaire.

Se concentreront-ils davantage sur le maintien de leur soutien dans les villes du Canada et auprès des jeunes électeurs? Ou seront-ils plus préoccupés par les électeurs des Prairies et ceux des communautés plus dépendantes des ressources? Et à quelle vitesse le changement climatique reviendra-t-il au premier plan des préoccupations de l’électorat, une fois que les gens auront l’impression que l’on a vraiment stoppé la pandémie?

Le premier signe clair d’une réponse à ces grandes questions viendra lorsque la gouverneure générale Mary Simon prononcera le discours du Trône du gouvernement.

Kathleen Monk est propriétaire principale de Monk + Associates, une société indépendante d’affaires publiques. Elle apparaît régulièrement à l’émission Power and Politics du réseau CBC News et siège au conseil d’administration de CIVIX, un organisme de bienfaisance non partisan qui se consacre à la formation de citoyens engagés.