Selon des estimations récentes des Nations Unies, la population mondiale devrait augmenter de près de 2 milliards de personnes au cours des 30 prochaines années, passant de 8 milliards actuellement à 9,7 milliards d’ici 2050, puis devrait atteindre un sommet de 10,4 milliards au milieu des années 2080. Les terres arables de la planète étant limitées, il est évident que les rendements agricoles doivent s’améliorer de manière durable.
L’alimentation est au coeur des Objectifs de développement durable (ODD) des Nations Unies pour le 21e siècle. L’un de ces objectifs consiste à « éliminer la faim, assurer la sécurité alimentaire, améliorer la nutrition et promouvoir l’agriculture durable ». La réalisation de cet objectif à l’horizon 2030 nécessitera toutefois des changements majeurs dans les systèmes agricoles et alimentaires mondiaux. Selon les Nations Unies, deux des composantes de cet objectif consistent à doubler la productivité agricole des petits producteurs de denrées alimentaires et à veiller à ce que les systèmes de production alimentaire soient durables.
Si vous demandez aux gens de décrire le rôle du gaz naturel dans notre approvisionnement alimentaire depuis la ferme, la plupart d’entre eux vous répondront que cette source d’énergie est essentielle au chauffage des bâtiments, au transport des aliments jusqu’au supermarché, et comme combustible. Il s’agit là effectivement d’aspects non négligeables du rôle du gaz naturel, mais il ne se limite pas qu’à cela. Nombreux sont ceux qui ignorent que le gaz naturel joue un autre rôle majeur dans la sécurité alimentaire mondiale aujourd’hui, soit dans le cadre de la production d’engrais synthétiques.
Et c’est là que le gaz naturel devient indispensable, c’est-à-dire en tant que matière première pour la fabrication d’engrais. Pour les engrais à base d’azote, le groupe de produits d’engrais le plus important, le processus commence par la combinaison de l’azote qui se trouve dans l’air et de l’hydrogène du gaz naturel à des températures et à des pressions élevées pour créer de l’ammoniac. Environ 60 % du gaz naturel est utilisé comme matière première, tandis que les autres matières alimentent le processus de synthèse. L’ammoniac ou l’urée (un solide fabriqué à partir de l’ammoniac) sont les sources d’azote fertilisant les plus riches qui soient. Ajoutons que les engrais synthétiques ont été qualifiés de « versions suralimentées des engrais organiques ». Cette description est pertinente, car à titre d’exemple, le lisier de porc contient environ 1 % d’azote, alors que l’urée en contient près de 46 %.
L’azote est un élément nutritif essentiel pour pratiquement toutes les plantes. C’est d’ailleurs le point de départ de tous les engrais azotés minéraux. Environ 70 % de la production mondiale d’ammoniac sert à la la fabrication d’engrais. Selon un document d’analyse de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) datant de juin 2022, à l’exception de ce qui se fait en Chine, l’ammoniac est fabriqué presque exclusivement à partir de gaz naturel, ce qui représente une consommation annuelle d’environ 170 milliards de mètres cubes (soit 4 % de la consommation mondiale de gaz naturel).
Les engrais synthétiques ont largement éliminé le besoin de labourer, ce qui favorise le captage du carbone, réduit les intrants tels que la main-d’oeuvre, le carburant et les machines pour labourer la terre, et contribue à préserver la santé du sol.
Les engrais synthétiques donnent un bon coup de pouce aux agriculteurs. En effet, les plantes peuvent absorber les engrais synthétiques immédiatement (en raison de leur solubilité), ou bien ceux-ci peuvent libérer lentement leurs ingrédients actifs pour fournir un apport continu en nutriments. Ces deux façons de faire peuvent être avantageuses. La première permet de favoriser immédiatement la croissance des plantes, alors que la seconde présente des avantages à plus long terme, tels que la réduction des coûts.

Ces facteurs rendent donc l’utilisation d’engrais synthétiques très souhaitable. Au Canada, leur utilisation est environ 50 % plus élevée qu’il y a dix ans, ce qui contribue à produire d’importants volumes de céréales excédentaires aux fins d’exportation. Selon Statistique Canada, en 2021, le Canada a exporté pour une valeur de 8,3 milliards de dollars de blé, ce qui en fait le quatrième exportateur mondial. Cette année-là, les principales destinations pour le blé canadien étaient la Chine, le Japon et l’Indonésie.
« L’importance de l’énergie n’a jamais été aussi grande pour l’agriculture canadienne et la sécurité alimentaire mondiale » [traduction], déclare Keith Currie, président de la Fédération canadienne de l’agriculture. M. Currie sait de quoi il parle : il est un agriculteur canadien de huitième génération et a représenté des dizaines de conseils d’administration, d’organismes, d’associations et de comités consultatifs gouvernementaux dans le domaine de l’agriculture.
La popularité du gaz naturel n’est pas unique au Canada. En effet, selon un document publié par l’American Gas Association en mars 2023, les producteurs d’engrais et d’autres produits agrochimiques sont les principaux consommateurs de gaz naturel dans la chaîne d’approvisionnement agricole des États-Unis. Le document indique qu’entre 70 et 80 % de l’énergie utilisée pour produire les engrais indispensables à l’augmentation de la production nationale américaine de cultures telles que le blé, le soja, le maïs, le riz et l’avoine, provient du gaz naturel.
N’oublions pas non plus qu’il s’agit d’un marché mondial. Les avantages du gaz naturel dans le secteur de l’agriculture sur la planète s’étendent à toutes les étapes de la culture, de la récolte et du transport des aliments. Il est devenu un combustible de choix pour la production d’engrais, l’alimentation des systèmes d’irrigation, du matériel agricole et des véhicules de transport, et bien d’autres usages. « Qu’il s’agisse de chauffer les granges et les serres ou d’alimenter le séchage des céréales et d’autres usages à la ferme, l’accès au gaz naturel est essentiel à la réduction de l’empreinte environnementale de l’agriculture et à la capacité des agriculteurs de produire des denrées alimentaires à un prix abordable » [traduction], déclare M. Currie.

Et cet élan d’enthousiasme envers le gaz naturel s’amplifie, car son rôle a encore gagné en importance ces dernières années, comme en témoigne l’inflation des prix des denrées alimentaires qui dépasse l’inflation générale. En outre, comme nous l’avons vu plus haut, le gaz naturel soutient les Objectifs de développement durable des Nations Unies, étant donné qu’il s’agit du combustible fossile le plus propre, le plus abordable et le plus efficace qui peut alimenter de nombreux processus agricoles. Il établit un lien solide entre la sécurité alimentaire au Canada et dans le monde, et la sécurité énergétique pour les agriculteurs canadiens.
Pour maintenir ce lien, M. Currie estime que le Canada a besoin d’une infrastructure de distribution élargie pour le gaz naturel, un combustible fossile fiable, abordable et propre, afin que les agriculteurs puissent réduire davantage leurs émissions, tout en restant concurrentiels à l’échelle mondiale. Le développement de nouvelles infrastructures de ce type offre la possibilité de soutenir des avancées encore plus importantes dans le domaine du gaz naturel renouvelable; par exemple, l’utilisation de sous-produits agricoles pour produire de l’énergie plus propre à l’avenir.
Le Canada continuera à jouer son rôle, ajoute M. Currie. « Nous devons être stratégiques, investir dans l’avenir de nos industries et travailler ensemble pour saisir les opportunités qui s’offrent au Canada de devenir un leader mondial de l’approvisionnement durable en denrées alimentaires et en énergie. » [Traduction]
Graham Chandler a passé une décennie dans le domaine de la finance d’entreprise et de la gestion du marketing énergétique. En tant qu’écrivain indépendant à temps plein, il s’est spécialisé dans les sujets énergétiques au cours des 20 dernières années.