
Merci d’avoir pris le temps de nous rencontrer. Pouvez-vous nous parler un peu de votre parcours professionnel jusqu’à votre poste actuel de président et chef de la direction de Fortis BC?
J’ai commencé ma carrière dans le secteur de l’énergie en 1993 chez Westcoast Energy Inc., où j’ai travaillé dans le financement d’entreprise et de projets, puis j’ai rallié les rangs de FortisBC en 2004. J’ai eu l’occasion d’occuper plusieurs postes de direction au sein de cette entreprise, y compris la supervision administrative dans les domaines du service à la clientèle et de la technologie, des affaires réglementaires, des solutions énergétiques et de la gestion de la demande, de la planification stratégique et du développement de l’entreprise, ainsi que des finances et de la trésorerie.
Tout au long de mon parcours au sein de FortisBC, et plus particulièrement aujourd’hui en tant que président et chef de la direction, j’ai poursuivi notre approche axée sur le client afin d’assurer un avenir énergétique abordable et durable, en mettant l’accent sur la sécurité et la fiabilité de notre réseau d’approvisionnement en énergie, en favorisant un avenir énergétique à faible émission de carbone et en accordant la priorité à notre travail avec les communautés autochtones.
La Colombie-Britannique est à bien des égards au centre du débat sur le gaz naturel au Canada – en tant qu’important producteur et utilisateur national, et en tant que principal point de sortie de ce qui pourrait être une énorme industrie d’exportation. Comment voyez-vous le rôle de FortisBC dans cette période très stimulante pour le secteur, la province et le pays?
En tant que fournisseur d’énergie essentiel en Colombie-Britannique, nous pensons que FortisBC jouera un rôle crucial en aidant à mener la transition vers une énergie à faible teneur en carbone. Notre objectif principal est de nous assurer que nous fournissons à nos clients et à nos communautés une énergie sûre, fiable et abordable, notamment du gaz naturel, de l’électricité, du gaz naturel renouvelable[1] (GNR) et d’autres sources d’énergie à plus faible teneur en carbone[2]. Toutefois, cela ne signifie pas que notre secteur ou FortisBC adopte une approche de maintien du statu quo. La transition énergétique comporte des défis et des opportunités considérables, et nous estimons que les réseaux d’électricité et de gaz naturel constituent des plateformes intéressantes pour mener à un avenir moins pollué par le carbone. Nous voyons une opportunité clé dans l’intégration des réseaux électriques et gaziers, afin de travailler ensemble pour mieux répondre aux besoins énergétiques, notamment pour relever les défis que pose la capacité de pointe, et soutenir les réductions d’émissions. Il est également possible de réduire considérablement les émissions grâce à une meilleure gestion de la demande afin de réduire la consommation d’énergie, tout en adoptant une énergie à plus faible teneur en carbone pour remédier à cette réduction du débit. Cette énergie à plus faible teneur en carbone ne sera pas seulement de l’électricité renouvelable, mais aussi des gaz renouvelables tels que le GNR.
Il est également possible d’examiner comment nos réseaux peuvent contribuer à la décarbonisation d’autres secteurs. Dans bon nombre de régions, le transport est le secteur qui génère le plus d’émissions. La décarbonisation dans ce secteur comprend l’adoption accrue des véhicules électriques, ainsi que le recours au gaz naturel liquéfié (GNL) et aux gaz renouvelables dans les parcs de véhicules lourds et le ravitaillement maritime. Comme le révèle notre dernier rapport sur le développement durable, au cours de l’année 2023, nous avons aidé nos clients à éviter les émissions de gaz à effet de serre en utilisant le GNL dans le ravitaillement maritime, en remplaçant le diesel par du gaz naturel comprimé dans le secteur des transports et en fournissant du GNR.
Nous avons été la première entreprise au monde à proposer à nos clients un système de ravitaillement en GNL des camions aux navires. En 2023, nous avons réalisé un peu plus de 1 700 opérations de ravitaillement de navires en GNL à l’aide d’exploitants de transbordeurs locaux; et la même année, nous avons atteint un jalon pluriannuel de plus de 7 000 opérations de ravitaillements en GNL. Nos clients maritimes ont pu ainsi éviter de produire 40 200 tonnes d’équivalent en dioxyde de carbone en 2023 en recourant au GNL dans le ravitaillement maritime au lieu du combustible de soute traditionnel[3].
Vous venez de vivre une élection assez fascinante. Comment voyez-vous l’évolution de la politique gazière et du cadre règlementaire de la Colombie-Britannique sous la direction du premier ministre Eby au cours de ce prochain mandat, et quelles sont les répercussions de cette élection sur vos clients?
FortisBC est au service de la province de la Colombie-Britannique depuis plus de 100 ans, et nous comptons près de 1,3 million de clients pour le gaz et l’électricité dans 135 communautés et 58 communautés autochtones. En tant que fournisseur de services essentiels axé sur la communauté, nous nous efforçons d’entretenir des relations proactives avec tous les ordres de gouvernement, car, en fin de compte, nous servons les mêmes électeurs, c’est-à-dire les citoyens de la Colombie-Britannique.
On peut s’attendre à ce que la récente réélection du premier ministre Eby et de son gouvernement assure la continuité de la politique environnementale et énergétique. Nous restons déterminés à collaborer avec la province pour faire progresser la transition vers une énergie à faible teneur en carbone et les objectifs climatiques provinciaux. Au cours des dernières années, nous avons travaillé à faire progresser les objectifs stratégiques provinciaux énoncés dans les plans de CleanBC et de CleanBC Roadmap to 2030, ainsi que dans le cadre d’action énergétique de la Colombie-Britannique. Par exemple, nous élargissons notre portefeuille d’énergies renouvelables et à faible teneur en carbone, nous explorons les possibilités qu’offre le gaz à intensité réduite pour produire du gaz naturel dont les émissions de GES sont plus faibles sur l’ensemble de leur cycle de vie. De plus, nous encourageons l’efficacité énergétique, les économies d’énergie des clients et les réductions des émissions de GES dans nos plans de conservation et de gestion de l’énergie, tout en pilotant et élargissant les programmes de rénovation énergétique en profondeur et les solutions de chauffage à deux combustibles. Nous pensons que notre expertise dans les réseaux énergétiques électriques et gazeux nous donne la vision nécessaire pour aider à développer une voie diversifiée qui soutient une transition énergétique plus résiliente et plus abordable.
FortisBC a fait activement progresser ses travaux liés au GNR et à l’hydrogène. Quel rôle voyez-vous jouer ces combustibles gazeux à court et à long terme?
Notre réseau de gaz naturel joue un rôle important dans la satisfaction des besoins énergétiques des Britanno-Colombiens, et nous pensons qu’il continuera à le faire dans les années à venir. Grâce à sa capacité à stocker et à répartir rapidement de grands volumes d’énergie, le réseau de gaz est particulièrement important pour les périodes de froid. Par exemple, plus tôt cette année, le réseau de gaz naturel de FortisBC a fourni environ le double de l’énergie générée par les réseaux électriques de la Colombie-Britannique le vendredi 12 janvier 2024, lorsque la province a connu sa journée la plus froide. En effet, au moment où la demande a été la plus élevée, les fournisseurs d’électricité ont fourni 11 300 mégawatts (MW), alors que le réseau de gaz de FortisBC en fournissait 21 700 MW.
« Le réseau de gaz naturel de FortisBC a fourni environ le double de l’énergie générée par les réseaux électriques de la Colombie-Britannique».[traduction]
Nous pensons que notre réseau de gaz naturel joue un rôle important dans la satisfaction des besoins énergétiques des Britanno-Colombiens, et nous reconnaissons la nécessité de passer à des solutions énergétiques à plus faible teneur en carbone. En 2010, nous avons lancé le premier programme volontaire de GNR en Amérique du Nord et avons depuis travaillé avec des entreprises, des décharges, des sociétés d’énergie verte et des municipalités pour nous approvisionner en GNR.
Nous continuons d’élargir le stock de GNR que nous acquérons pour nos clients, en cherchant à nous associer à davantage d’organismes et de gouvernements. Une installation de GNR en construction à la décharge de Vancouver représentera notre plus grand projet de GNR en Colombie-Britannique. En 2023, nous avons acquis 2,8 pétajoules (PJ) de GNR pour nos clients, soit suffisamment d’énergie pour alimenter environ 27 500 ménages de la Colombie-Britannique pendant un an, et nous avons approuvé des contrats pour acquérir 18 PJ au cours des prochaines années. Notre approvisionnement en GNR a aidé les clients à éviter de produire près de 265 000 tonnes d’équivalent en dioxyde de carbone en 2023, ce qui équivaut à retirer de la circulation plus de 57 000 voitures à essence[4].
Nous examinons également des moyens de faire progresser d’autres gaz renouvelables et à faible teneur en carbone, comme l’hydrogène. Nous utilisons des fonds provinciaux pour effectuer des recherches sur l’acheminement de l’hydrogène par le réseau de gaz naturel en Colombie-Britannique, investir dans l’innovation pour soutenir le potentiel de production et d’utilisation de l’hydrogène et faire avancer de nombreux projets liés à l’hydrogène. Cette année, par exemple, nous avons annoncé notre participation à une collaboration formée dans le cadre d’un protocole d’entente entre nous et Hazer Group Ltd. pour élaborer un projet pilote de production d’hydrogène en Colombie-Britannique. Si le projet pilote est développé, il devrait produire environ 2 500 tonnes d’hydrogène par an, soit environ 300 000 gigajoules de gaz.
En ce qui concerne l’électricité, nous avons récemment annoncé une demande d’expression d’intérêt pour un maximum de 1 100 gigawattheures d’énergie afin de répondre à la demande croissante dans la région intérieure sud de la Colombie-Britannique.
Quels conseils donneriez-vous à une personne qui vient de faire son entrée dans le secteur de l’approvisionnement en gaz?
Ne perdez jamais de vue qu’en tant que membre de ce secteur, vous êtes au cœur d’une entreprise très vaste et très importante, celle de contribuer à résoudre le trilemme de l’énergie. J’entends par là qu’il faut maintenir l’équilibre entre les trois éléments de ce trilemme : la fiabilité, la durabilité et l’abordabilité. Dans le secteur de l’approvisionnement en énergie, cela signifie soutenir un bouquet énergétique diversifié et l’utilisation continue du réseau gazier existant, avec des combustibles à faible teneur en carbone comme le GNR et, potentiellement à l’avenir, l’hydrogène.
1Le gaz naturel renouvelable (également appelé GNR ou biométhane) est produit d’une manière différente du gaz naturel conventionnel. Il est dérivé du biogaz, qui provient de la décomposition des déchets organiques de décharges, de résidus agricoles et d’eaux usées d’installations de traitement. Le biogaz est capturé et nettoyé pour créer du GNR. Lorsque le GNR est ajouté au réseau de gaz naturel nord-américain, il se mélange au gaz naturel classique. Cela signifie que nous ne pouvons pas diriger le GNR vers un client en particulier. Toutefois, plus le GNR est intégré au réseau de gaz naturel, moins on a besoin de gaz naturel classique, ce qui réduit l’utilisation de combustibles fossiles et les émissions globales de gaz à effet de serre.
2FortisBC utilise le terme gaz renouvelable et à faible teneur en carbone pour désigner collectivement les gaz ou combustibles à faible teneur en carbone que les services publics peuvent acquérir en vertu de la règlementation sur la réduction des gaz à effet de serre (énergie propre), à savoir : le gaz naturel renouvelable (également appelé GNR ou biométhane), l’hydrogène, le gaz de synthèse (à partir de déchets de bois) et la lignine. Le portefeuille de gaz renouvelable et à faible teneur en carbone de FortisBC ne comprend actuellement que du gaz naturel renouvelable. D’autres gaz et combustibles pourront s’ajouter au programme au fil du temps. En fonction de leur source, tous ces gaz ont différentes intensités carbones sur l’ensemble de leur cycle de vie. Cependant, tous ces gaz sont à faible teneur en carbone si on les compare à l’intensité carbonique du gaz naturel conventionnel sur l’ensemble de son cycle de vie. Le facteur d’émission actuel de l’extrémité du brûleur du GNR est de 0,27 gramme d’équivalent en dioxyde de carbone par mégajoule d’énergie (g éq. CO2/MJ) et les émissions actuelles du cycle de vie du portefeuille de gaz renouvelable et à faible teneur en carbone pour la combustion stationnaire sont de 22 g éq. CO2/ MJ. Ce chiffre est inférieur au seuil de faible intensité carbonique de la Colombie-Britannique pour le cycle de vie de 30,8 g éq. CO2/MJ, tel qu’il est définit dans les modifications de 2024 du Greenhouse Gas Reduction Regulation (règlement sur la réduction des gaz à effet de serre).
3Source: 2023 Sustainability Report, page 21
4Source : 2023 Sustainability Report, page 19. Calculé à l’aide du calculateur des équivalences des émissions de gaz à effet de serre de Ressources naturelles Canada.