Le vortex polaire qui a perturbé l’Ouest canadien cet hiver a montré très clairement comment les événements météorologiques peuvent avoir un effet profond sur la demande d’énergie au Canada : le froid intense a nécessité d’énormes quantités d’énergie pour garder la population canadienne au chaud. Il est donc rassurant de savoir que les compagnies d’électricité conçoivent leurs systèmes d’approvisionnement en énergie de manière à pouvoir faire face à une demande extrême – ou, comme on le dit au sein de l’industrie, à une demande « de pointe ». En termes simples, cela signifie que les systèmes sont construits pour supporter l’heure la plus froide (ou la plus chaude) de l’année.

Dans le présent numéro, nous examinons les particularités de la conception des systèmes en fonction de la demande de pointe, tant pour le gaz naturel que pour l’électricité au Canada.

DEMANDE ANNUELLE ET POINTES SAISONNIÈRES

Commençons par examiner deux données plus générales : la demande annuelle et les pointes saisonnières pour le gaz naturel et l’électricité. Selon la Régie de l’énergie du Canada, le pays a consommé près de 580 TWh d’électricité et 1230 TWh de gaz naturel sur l’ensemble de l’année 2022; cela signifie 2,1 fois plus de gaz naturel que d’électricité! Cependant, ces chiffres ne donnent pas une image complète de la situation. D’une part, nous savons que la demande d’énergie varie selon les saisons. Examinons donc de plus près la consommation mensuelle dénergie.

La répartition par mois de la figure 1 indique une dépendance beaucoup plus importante au système de gaz pendant la saison hivernale, lorsque la demande pour le chauffage des locaux est plus élevée. On constate qu’au cours d’un mois comme janvier, la demande de pointe est supérieure de plus de 50 % à la demande mensuelle moyenne annuelle. En outre, l’écart entre les deux systèmes s’est creusé, la consommation de gaz passant d’environ 2,1 fois à 2,5 fois celle de l’électricité.

Figure 1

QU’EN EST-IL DES POINTES QUOTIDIENNES

Les écarts importants entre les chiffres annuels et mensuels soulèvent des questions sur ce qui se passe au quotidien. Pour y répondre, utilisons certaines données relatives au vortex polaire qui s’est produit entre le 11 et le 15 janvier de cette année dans l’Ouest canadien. Voici un résumé des pics d’approvisionnement en énergie dans les provinces de la Colombie-Britannique, de l’Alberta et de la Saskatchewan au cours de cette période.

Colombie-Britannique :

Le vendredi 12 janvier, la Colombie-Britannique a été frappée par un froid extrême, et certaines parties de la province ont alors connu des températures aussi basses que -45 °C. Le même jour, BC Hydro a annoncé avoir fourni 11 300 MW d’électricité, un record. Le même jour, FortisBC a également enregistré une demande record : 21 763 MW de gaz naturel, soit près de deux fois la demande d’électricité.

Alberta :

En Alberta, les températures ont atteint jusqu’à -45 °C. En réaction, la consommation délectricité dans la province a atteint 12 384 MW, un record selon l’Alberta Electric System Operator. Tout au long de la fin de semaine, ATCO Gas a indiqué que le réseau de gaz naturel de l’Alberta avait fourni jusqu’à 110 340 MW d’énergie, soit près de 10 fois la quantité d’énergie fournie par le réseau électrique.

Saskatchewan :

Ce phénomène météorologique a entraîné des températures glaciales similaires en Saskatchewan, certaines parties de la province atteignant des minima de -44 °C. Le réseau électrique de la province a atteint un pic de 3 810 MW le 13 janvier, à 100 MW près du record historique. Le même week-end, la province a également établi un nouveau record deconsommation journalière de gaz de 1,70 PJ/jour1, ce qui équivaut approximativement à 19 700 MW : plus de 5 fois la demande d’électricité du lendemain.

Le graphique de la figure 2 résume les demandes de pointe en énergie telles qu’elles ont été décrites ci-dessus. Le graphique comprend également les demandes de gaz annuelles et les demandes de pointe saisonnières dans chaque province, converties en un approvisionnement moyen en énergie (en MW), selon le Régie de l’énergie du Canada et Statistique Canada.

Ce qui ressort des données, c’est la quantité d’énergie transportée par le réseau de gaz naturel par rapport au réseau électrique dans ces trois provinces. En période de demande de pointe, lorsque les Canadiens et Canadiennes ont le plus besoin d’énergie, les réseaux de gaz de la Colombie-Britannique, de l’Alberta et de la Saskatchewan ont pu fournir jusqu’à 10 fois plus d’énergie que les réseaux électriques. Les lecteurs et lectrices se souviendront peut-être que l’Alberta émettait des alertes parce qu’elle craignait que le système électrique ne puisse pas répondre à la demande : aucune alerte de ce type n’a été émise à propos d’un système gazier fournissant plus de 9 fois plus d’énergie.

Figure 2

Pour répondre à la question « pourquoi la demande de pointe est-elle importante? », il suffit de regarder le graphique de la figure 2. Dans les trois provinces, la demande de pointe est supérieure de 20 % à la moyenne saisonnière et représente plus de 51 % de la demande annuelle moyenne. En d’autres termes, il est essentiel de disposer d’un système capable de répondre de manière fiable à cette demande pour éviter que la population canadienne ne gèle dans l’obscurité.

Comme nous l’avons vu précédemment, la demande de pointe est la base sur laquelle nos systèmes énergétiques sont conçus. Même s’ils ne fonctionnent pas à pleine capacité pendant la majeure partie de l’année, le fait de les concevoir en fonction des conditions de pointe garantit qu’ils restent stables et fiables pendant les heures ou les jours critiques de l’année. Aucun autre système énergétique au Canada n’y parvient mieux que notre système d’approvisionnement en gaz naturel.


1https://www.saskenergy.com/about-us/newsroom/saskenergy-sets-new-daily-natural-gas-usage-record-0