La conversation autour de l’efficacité énergétique dans le logement évolue. Alors qu’autrefois elle ne figurait même pas dans les préoccupations de la plupart des Canadiens, les propriétaires et les locataires s’attendent maintenant à un certain niveau d’efficacité énergétique dans les nouvelles maisons. Cette attente est fondée sur la réalité — les maisons construites aujourd’hui sont beaucoup plus efficaces que celles construites il y a même 20 ans, grâce en grande partie à l’innovation au sein de l’industrie et aux partenariats passés entre le gouvernement et l’industrie qui ont permis aux Canadiens de figurer parmi les personnes les mieux logées au monde. Mais alors que nous nous efforçons de réduire nos émissions collectives de gaz à effet de serre (GES), il est important que nous n’érodions pas davantage l’accessibilité au logement pour la prochaine génération. Une politique intelligente en matière de logement et un investissement gouvernemental dans des mesures d’efficacité énergétique ciblées qui favorisent l’accessibilité financière sont fondamentaux pour continuer à améliorer nos maisons.
L’efficacité énergétique sous l’angle de l’accessibilité financière
Alors que l’amélioration de l’efficacité énergétique des habitations prend de l’ampleur, il est important de considérer les idées qui sont sur la table à travers le prisme de l’accessibilité financière d’une maison. Les maisons d’aujourd’hui sont déjà très efficaces sur le plan énergétique, et atteindre des niveaux d’efficacité plus élevés exige des compétences, une expérience et des coûts supplémentaires. Si des exigences sont mises en place sans évaluer suffisamment les coûts qu’elles ajoutent à la construction (et même potentiellement à l’exploitation — pour la climatisation, par exemple), nous risquons d’éroder davantage l’accessibilité financière. L’astuce consiste à trouver des solutions innovantes pour réduire les coûts de construction afin de faire baisser les paiements hypothécaires.
Il y a de nombreux professionnels dans tous les domaines de l’industrie de la construction résidentielle qui sont passionnés par l’innovation dans le but d’améliorer l’efficacité énergétique d’une maison sans ajouter de coûts. Les membres du Conseil de la maison à consommation énergétique nette zéro de l’ACCH comprennent des constructeurs, des rénovateurs, des conseillers en énergie, des services publics, des fabricants et d’autres personnes qui travaillent à cet objectif commun et qui font partager ce qu’ils apprennent en cours de route. Tout aussi important est le travail que fait l’ACCH pour évaluer et communiquer les commentaires de l’industrie sur l’impact réel qu’auraient des centaines de modifications mineures et majeures proposées aux codes. Ce travail important, ainsi que la collaboration et le volontarisme des leaders de l’industrie, contribuent à propulser les progrès de la science du logement. Mais avec un soutien supplémentaire des gouvernements, l’adoption généralisée de mesures d’efficacité améliorées peut se faire beaucoup plus rapidement sur une base facultative, surtout s’il y a de l’innovation pour trouver des solutions plus abordables.
« Une politique intelligente en matière de logement et un investissement gouvernemental dans des mesures d’efficacité énergétique ciblées qui favorisent l’accessibilité financière sont fondamentaux pour continuer à améliorer nos maisons ».
Le rôle du gouvernement
Le gouvernement fédéral dispose de leviers politiques pour s’attaquer aux changements climatiques et améliorer l’accessibilité financière en tandem — et il faudra une politique intelligente pour y parvenir. Lors de la récente élection fédérale, l’accessibilité financière des logements au taux du marché a fait l’objet d’un débat passionné entre les électeurs et les candidats politiques, et a donné lieu à l’inclusion de nombreuses mesures relatives au logement dans les plateformes des principaux partis. Dans sa plateforme, le Parti libéral nouvellement réélu a proposé la création d’un Centre d’innovation pour les matériaux de construction à faible teneur en carbone, qui travaillera directement avec les entrepreneurs, les municipalités, les provinces et territoires et les gouvernements autochtones pour s’assurer que les innovations canadiennes sont les mieux placées pour réussir. De même, les conservateurs ont inclus dans leur plateforme un plan pour développer des initiatives visant à soumettre à des projets pilotes de nouvelles technologies et solutions qui réduiront les coûts et accéléreront le rythme des rénovations énergétiques des logements. Investir dans la recherche et le développement et jouer un rôle de leader en réunissant des groupes pour innover est une étape positive; il est également nécessaire de s’assurer que l’accessibilité au logement est l’un des résultats escomptés.
Avant de réglementer des niveaux de performance énergétique excessivement élevés dans tout le pays, le gouvernement devrait d’abord se concentrer sur l’innovation pour faire baisser les coûts et favoriser l’utilisation volontaire, afin d’améliorer l’accessibilité financière pour les consommateurs, et non l’aggraver.
L’investissement dans les maisons éconergétiques ne concerne pas seulement la construction de nouvelles maisons. Le Canada compte 14 millions de logements, et environ 43 % du parc immobilier actuel a été construit avant 1983. La majorité de ces vieux bâtiments sont loin derrière les nouvelles maisons en matière d’efficacité énergétique. Le fait de se concentrer uniquement sur les nouvelles constructions ne permettra pas au Canada d’atteindre ses objectifs de réduction des GES pour le logement. Même si toutes les nouvelles maisons construites d’ici 2030 étaient construites de manière à ne produire aucune émission, nous n’atteindrions toujours pas notre objectif.
La rénovation des maisons existantes doit faire partie de la solution, et les gouvernements à tous les niveaux doivent trouver des moyens d’aider davantage de propriétaires à obtenir l’aide dont ils ont besoin pour apporter des améliorations éconergétiques à leur maison. L’engagement fédéral de 2,6 milliards de dollars pour fournir des subventions pour des améliorations éconergétiques, des évaluations énergétiques ÉnerGuide gratuites et un soutien pour recruter et former des conseillers en énergie ÉnerGuide incitera les propriétaires à entreprendre ces travaux nécessaires.
« La rénovation des maisons existantes doit faire partie de la solution, et les gouvernements à tous les niveaux doivent trouver des moyens d’aider davantage de propriétaires à obtenir l’aide dont ils ont besoin pour apporter des améliorations éconergétiques à leur maison ».
L’industrie a besoin de plus de professionnels formés pour répondre à la demande croissante, notamment des constructeurs, des rénovateurs et des ouvriers qualifiés. La formation est un élément clé du programme d’étiquetage des maisons à consommation énergétique nette zéro de l’ACCH, qui garantit que chaque maison participante est qualifiée par une tierce partie pour répondre aux exigences techniques spécifiées. Mais nous avons besoin de plus de professionnels formés dans l’industrie. Selon ConstruForce Canada, l’industrie de la construction résidentielle devra attirer et former environ 148 000 travailleurs au cours de la prochaine décennie pour combler les départs à la retraite et répondre à la demande croissante de construction et de rénovation de maisons neuves. Le gouvernement fédéral a un rôle à jouer dans l’élargissement des possibilités pour promouvoir les métiers spécialisés pour les jeunes et améliorer le système d’immigration pour mieux répondre aux pénuries de main-d’œuvre par des solutions permanentes.
Prochaines étapes
L’amélioration de la qualité et de l’efficacité énergétique des maisons est un objectif louable, mais compte tenu de la crise de l’accessibilité au logement, cela doit être fait en tandem avec un véritable objectif d’accessibilité. L’industrie de la construction résidentielle innove volontairement pour nous y amener. Mais avant que le Canada puisse envisager une réglementation généralisée, nous devons investir davantage dans des mesures d’efficacité énergétique ciblées qui favorisent l’accessibilité financière. Avec une politique intelligente en matière de logement qui inclut l’accessibilité financière comme objectif, et des gouvernements à tous les niveaux qui travaillent ensemble avec l’industrie et les citoyens, nous pouvons atteindre nos objectifs. Mais si l’accessibilité financière n’est pas une priorité, nous nous demanderons pourquoi nous n’avons pas atteint nos objectifs en matière de changement climatique (et pourquoi l’accessibilité financière a empiré au lieu de s’améliorer).